J’étais certaine qu’il fallait un code magnétique ou une manucure clandestine pour entrer ici. Que je devais avoir mon test de Q.I. broché autour de mon élastique à cheveux pour éviter de faire sonner le détecteur qui entoure les portes. Mais non. Ç’a l’air que toutes les marques de bottes d’hiver ont le droit de se traîner les pieds jusqu’aux histoires.

C’est juste que je ne sais pas comment faire. Je ne me suis pas entraînée à croiser des piles de papiers sans domicile fixe. Je ne me suis jamais trempée dans la pluie des autres. Je connais ma propre humidité, c’est tout. Si j’en touche un, si l’eau se répand jusqu’à mes yeux, en aucun cas je n’aurai assez d’argent pour payer l’équipe du « Groupe Qualinet, leader après sinistre ». De toute façon, pas certaine qu’ils gèrent les glissements de terrain de personnes stupides. 

Je prends un livre entre mes mains, n’importe lequel. Mon poignet plie. Maudit que je suis conne ! Je ne serai jamais capable de lire toutes ces pages-là ! Pourtant, les gens autour soulèvent ces briques. Ils sont prêts à construire leur chemin de traverse, savent où placer les tranches de Lego. 

C’est là qu’une voix chantonne vers moi : « Oh ! Il est super bon, ce livre-là ! Tu connais ? » Non ! Je suis insignifiante. Je suis une girafe qui joue au limbo. Pourquoi je fonce tout le temps dans la maudite barre ? J’aimerais avoir le courage de me courber le cou, de plonger, mais l’angoisse de me fendre le crâne étouffe mon potentiel talent à la nage papillon.

La voix de la libraire devient parapluie de golf. Aujourd’hui, je me mouille un orteil et demain, j’ouvrirai peut-être une fenêtre durant l’averse.